Cette démarche, ce déhanchement, ce matin, dans le métro, c'est moi. Je ne boite pas, je danse, juste un peu, discrétement, comme ca. Ce matin, c'est moi, dans ma tête ça fait :"Pah, pah, pah, pah".
"Bon, bah c'est dans un état ici!", constate Lucie, qui se demande s'il faut commencer à dépoussiérer ou plutôt continuer à observer les toiles d'araignée se tisser doucement dans les coins sombres, en pensant à autre chose, comme par exemple, au cinéma et à http://golliwogsblog.wordpress.com/.
Ici, c'est bien, calme, un rayon de soleil arrive juste, juste sur ma tête. On se concentre, confiture et produits laitiers. Personne ne bouge ou alors juste un peu, la tête, un bras, juste déposer un baiser sur ton front. Ici, on écoute un truc qui a vieilli, on laisse les verbes à l'infinitif, on se rappelle. Là bas, ca serait du soleil, des vagues, une petite brise, ici, là bas, quand est ce qu'on y va?
Dehors, c'est gris, ça te passe à travers les os. Ici, dedans, c'est bien, et les ombres s'effacent, dans le doux et le chaud. Lucie écoute Film School en pensant à un muscle, puis l'autre, et là un os, un noeud, une veine, un cartillage.
Du fond de son fauteuil plutôt comfortable, doté d'accoudoirs et d'un petit coussin moelleux, Lucie pense à une chambre à elle, dans le fond d'une maison dans sa tête, toute barricadée, ou elle pourrait ne rien faire en sa seule compagnie.
Et d'où viendrait la tirer parfois le papillonnement presque adopté en provenance de son ventricule gauche, accompagné d' une pincée de lumière dans les yeux et d'un léger sourire mi séduit, mi ironique appartenant à cette fille. Ou alors peut être quelques belles choses musclées qui sautilleraient en rythme, tchip tchip. Ou des terrasses de café. Oui tiens, et les terrasses de café, quand est ce qu'on les récupère?
Voilà, 2009 est déjà là , c'est malin ça, et nous on est censés faire quoi avec?, se demande Lucie qui cherche le mode d'emploi. Et puis ou est ce que j'ai foutu 2008 moi? Je commençais juste à savoir m'en servir.
Poznan, c'est comme une station d'essence sur la route de Valenciennes, comme un entrepot en bord de Scheelde, comme un ouvrier de chez Renault au chomage technique, comme une condamnation a des travaux d'interet public dans une maison de retraite, comme un sex shop a Marches en Famennes. A Poznan, les gens prennent le tram pour rentrer a la maison tous les soirs. A Poznan, c'est l'hiver, et il ne faut pas oublier que moi aussi je rentre a la maison.
- Ca va? - Oui - T'es sure? - Oui, j'ai vu des kangourous. - Mais à part ça, ça va? - Oui, puis je vais voir des baleines. - Et des crocodiles, tu vas en voir des crocodiles?
Parce que. Et puis d'abord, ça ne vous regarde pas, dit Lucie, qui replonge avec délice dans le fond de son lit accompagnée de la bande son appropriée.
Voilà un petit livre que vous recommande Lucie, qui l'explore du fond de son lit et du bout d'une rame de métro. Il partage le triple avantage de contenir des mots compliqués mais agréables à lire, comme "ontologie" par exemple, d'être bien écrit et aussi de ne pas du tout, du tout, parler d'amour.
Voilà. On pense aux JO. Laure Manaudou, la pauvre. Et puis la Géorgie, aussi, ça, ça nous préoccupe, là bas ça tire de partout, tacacacatac. On pense à la pile de dossiers, là, qu'il faut lire, commenter, transmettre, avant demain, et puis en track changes et copie à la secrétaire, qui les rentrera dans la base de données afin que tout soit en ordre, irréprochable. On s'ennuie. Et puis on se rappelle que c'est un luxe et alors on part comme une ombre, discrète, et un peu morte, chercher un petit coin secret et quelque part profond ou il resterait, peut être, une étincelle de vie, pour souffler dessus, pffiou, pfffiou, pffiou. On fait ce qu'on peut mais on peut peu. Très peu. On gesticule avec une véhémence aussi ridicule que touchante, genre tragédie grecque. Là ou le héros croit toujours qu'il va s'en sortir alors que le chœur n'arrête pas de gueuler derrière que c'est plutôt mal barré, mais lui, il n'entend pas, il continue. On oublie qu'on a oublié d'avoir peur. Alors on creuse un trou dans le jardin pour y foutre un cadavre avant de s'essuyer le front d'un geste fatigué, le sentiment du devoir accompli, au moins celui là il reviendra pas nous faire chier. On se dit "je suis un impératif philosophique Kantien", puis non, "je suis un paradigme Popperien, je suis réfutable" et puis on pense à Deleuze et on se rappelle qu'on s'en fout , arrêtes un peu de crâner. On voudrait être une ile déserte, mais on voit bien qu'en fait, on serait plutôt un petit état nationaliste avec des lois fiscales avantageuses. Alors on repense au cadavre, qu'on laisse pourrir là, tranquille, sous les bégonias. Et voilà. On pense aux JO, Laure Manaudou, la pauvre, Et puis, la Géorgie aussi, ça, ça nous préoccupe, tacacacacatac.